Sarah Rouamba, étudiante en septième année de médecine, incarne une génération de jeunes filles ambitieuses qui n’hésitent pas à briser les barrières. Mais ce qui la rend véritablement unique, c’est sa capacité à jongler entre sa blouse blanche et son statut de créatrice de contenu sur les réseaux sociaux.
L’histoire de Sarah et de son amour pour la caméra remonte à son enfance. « Mon père avait toujours un caméscope à la main. Il filmait chaque moment important de notre vie, à tel point que mon frère et moi nous demandions pourquoi cet appareil était omniprésent. Aujourd’hui, ces vidéos sont devenues des trésors, des souvenirs précieux qui nous rappellent d’où nous venons. » Cette immersion précoce dans l’univers de la vidéo a éveillé en Sara une passion pour l’image et le partage.
Sarah a grandi dans une famille où l’éducation et la créativité étaient fortement valorisées. Son père, en filmant les moments quotidiens, a involontairement planté les graines de son intérêt pour la création de contenu audiovisuel.
Entre passion et raison
Bien qu’elle ait envisagé une carrière en communication après le baccalauréat, ses excellents résultats en sciences et l’avis de sa famille l’ont orientée vers la médecine. « J’hésitais entre le Droit et la communication, mais mes parents m’ont poussée vers la médecine. J’ai suivi leurs conseils, mais l’envie de créer du contenu ne m’a jamais quittée », raconte-t-elle. Sara ne regrette pas ce choix. La médecine, avec sa rigueur et ses exigences, a développé en elle un sens de la discipline et de la résilience qui lui sont aujourd’hui très utiles dans son activité sur les réseaux sociaux. Cette double vie qu’elle mène n’est pas sans défis, mais elle lui permet de nourrir ses deux passions : soigner et partager.
Comme plusieurs autres créateurs de contenus, l’année 2020 était le top départ. Pour Sarah, ce fut le moment de franchir le pas. « Le confinement a été un tournant décisif. Mes études étaient en pause, et je me suis dit que c’était enfin l’occasion de réaliser ce rêve que je repoussais depuis trop longtemps. » Elle lance alors sa chaîne YouTube, un espace où elle partage son quotidien, ses découvertes, et sa vision du monde. Rapidement, elle se tourne vers Instagram, Snapchat, puis TikTok, où elle touche un public de plus en plus large. « Mon contenu reflète mon lifestyl : je parle de tout ce qui me passionne, que ce soit un nouveau restaurant, des anecdotes de ma vie d’étudiante en médecine, ou des faits divers qui m’interpellent. C’est un contenu qui me ressemble et qui résonne avec ceux qui partagent mes centres d’intérêt » a-t-elle décrit.
Avec plus de 31 000 abonnés sur TikTok et environ 16 500 sur Instagram, elle s’est forgé une communauté fidèle qui la suit avec intérêt. « Quand j’ai commencé, c’était difficile. Il fallait démarcher les marques, prouver sa valeur, et souvent, les gens nous prenaient pour des amateurs. Mais aujourd’hui, les choses ont changé. Les marques viennent vers moi, et je suis rémunérée pour certains partenariats. C’est gratifiant de voir que mon travail est reconnu. »
Au début de son aventure, Sarah n’utilisait pas de voix off dans ses vidéos. « Je n’aimais pas ma voix, alors je me contentais de mettre de la musique. » Mais pour des raisons de monétisation et de droits d’auteur, elle a dû s’adapter. « J’ai acheté un micro et j’ai commencé à ajouter ma voix. Même si je n’aime toujours pas me réécouter, cela a ajouté une nouvelle dimension à mon contenu. »
Sara voit cette activité comme bien plus qu’un simple hobby. Elle y trouve une source d’indépendance financière, tout en continuant à vivre chez ses parents. « Ce n’est pas que je suis devenue riche, mais je peux subvenir à certains besoins, ce qui m’apporte une certaine liberté. »
Ce qui rend Sarah particulièrement intéressante, c’est la manière dont elle parvient à concilier ses deux mondes. « Quand je dis que je fais de la médecine en plus de la création de contenu, les gens sont souvent surpris. Ils s’attendent à ce qu’une créatrice de contenu soit superficielle, mais en réalité, c’est tout le contraire. Être sur les réseaux sociaux, c’est être multitâche. On est à la fois réalisateur, scénariste, monteur, et caméraman. C’est un vrai boulot qui demande des compétences variées et de l’imagination. »
Sa notoriété dépasse même les murs de l’hôpital où elle effectue ses stages. « Parfois, des médecins supérieurs ou des patients me reconnaissent. Ils me disent ‘Ah, c’est vous que je vois sur les réseaux’. C’est toujours un peu étrange, surtout avec le masque, mais ça montre l’impact que peut avoir la création de contenu », pense Sara.
Au-delà de son travail de créatrice de contenu, Sara est profondément engagée sur le front de la santé mentale, un sujet qui lui tient particulièrement à cœur. « Un de nos professeurs en psychiatrie disait que ‘une grande partie du Burkina souffre de problèmes mentaux’, même si beaucoup ne le réalisent pas. Ici, la santé mentale est souvent considérée comme un problème de ‘blancs’, mais en réalité, elle nous concerne tous. En tant que nouvelle génération, il est de notre devoir de briser ce tabou et de venir en aide à ceux qui souffrent en silence. » Sarah sait que son engagement sur cette question pourrait faire la différence pour beaucoup de personnes. Elle utilise sa plateforme pour sensibiliser et partager des informations qui pourraient aider à démystifier la santé mentale au Burkina Faso.
Une créatrice de contenu en pleine évolution
Sarah ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. « Pour moi, la création de contenu est avant tout une passion, et je ne suis pas prête à l’abandonner. Mon contenu évolue avec moi, et je suis ouverte à toutes les possibilités. L’avenir est plein de promesses. »
Elle tient également à encourager les jeunes femmes qui souhaitent se lancer dans cette aventure. « Les réseaux sociaux peuvent être un terrain difficile, surtout pour les femmes. Il est facile de se comparer aux autres, ce qui peut nuire à la santé mentale. Mais si vous avez quelque chose à offrir, soyez authentiques et ne vous laissez pas décourager par les moqueries. Avoir un support système, comme j’ai eu avec mes parents et mes amis, est crucial pour garder les pieds sur terre. »